La Cour de Cassation est la plus haute cour de justice de la République d’Haiti et le tribunal de dernier ressort. Elle est chargée de veiller à la plus stricte observation des lois en vigueur. Elle joue le rôle de conseil Supérieur de la Magistrature et de Cour Constitutionnelle par exception.
La Cour de Cassation, comme toutes les hautes instances gouvernementales, siège à Port-au-Prince, la capitale d’Haïti.
Constitutionnellement, l’idée d’un tribunal de Cassation remonte à l’année 1816 avec la publication de la Constitution républicaine révisée et les lois publiées en 1817 et 1819 sur son organisation et ses attributions. Jusqu’alors, le Sénat de la République se transformait, à l’occasion, en tribunal suprême.
L’appellation de Cour de cassation n’apparut qu’en 1950, dans la Constitution publiée cette année-là. Avant, on parlait plutôt de Tribunal de cassation.
Aujourd’hui, sa composition, son organisation, sa compétence et même les effets de ses arrêts sont établis dans la Constitution de 1987, le décret du 22 août 1995 et le Code de Procédure Civile.
Histoire récente:
La Cour de cassation, comme d’ailleurs toutes les grandes institutions haïtiennes, a été secouée par la situation politiquement volatile du pays pendant la décade 2010 et au-delà, ce qui se traduisait souvent par des scandales et des tentatives de vassalisation de l’Exécutif, une démarche vraiment inédite pour cette institution.
Après la signature de l’Accord du 6 février 2016 entre les deux chambres du parlement et l’Exécutif, pour trouver une sortie à la crise qui se pointait avec la fin de mandat du président Joseph Michel Martelly et la non-tenue d’élections, les juges de la Cour qui se plaignaient alors d’avoir été ignorés dans les négociations conduisant à cet Accord, revendiquaient la présidence, au nom de l’Article 149 de la Constitution de mars 1987. Leur appel resta sans effet et le sénateur Jocelerme Privert devint président provisoire.
le 18 janvier 2019, le président Jovenel Moïse nomma ces cinq nouveaux juges1 :
- Me Jean Joseph Lebrun
- Me Jean-Claude Théagène
- Me Bathelemy Anthenor
- Me Sténio Bellevue
- Me Ivikel Dabrésil
À leur installation, le 1er février, la cour était au complet, la première fois depuis 2015.
Au milieu de l’année 2022, elle est à nouveau amputée de neuf membres, pour des raisons diverses. En fait, en 2021, trois juges avaient été renvoyés par l’Exécutif pour une supposée implication dans une tentative de coup d’état2; trois ont dû laisser la Cour, en 2022, leur mandat de 10 ans ayant expiré.
Un arrêté du gouvernement de facto dirigé par Ariel Henry annonça, le mardi 28 février 2023, la nomination de huit nouveaux juges. Ils ont été installés le 7 mars 2023, ce qui porta le nombre de juges à 11, un nombre en deçà du requis légal. Douze est le nombre prévu par la loi3.
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- Me Jean Joseph Lebrun, Président: Nommé en 2019;
- Me Jean-Claude Théogène, Vice-président: Nommé en 2019;
- Me Barthélemy Anténor: Nommé en 2019;
- Me Marie Jocelyne Casimir: Nommée en 2023;
- Me Ketsia Charles: Nommé en 2023;
- Me Frantz Drice: Nommé en 2023;
- Me Maguy Florestal: Nommée en 2023;
- Me Anès J. Joazéus: Nommé en 2023;
- Me Louisemé Joseph: Nommé en 2023;
- Me Rameau Patrick Métellus: Nommé en 2023;
- Me Frantzi Philémon, de 2023: Nommé en 2023.
Composition:
La Cour de cassation se compose depuis 1954, avec la publication de la loi organique du 16 juillet, de douze juges dont le président et le vice-président.
Pour être considéré au poste de juge à la Cour de cassation le citoyen bien imbu de la législation haïtienne doit montrer ses preuves après avoir exercé pendant sept ans au moins les fonctions de juge ou d’officier du Parquet dans une Cour d’Appel, ou bien en exerçant la profession d’avocat pendant dix ans au moins. Il est nommé par le Président de la République pour dix ans et est choisi sur une liste de trois personnes par siège vacant soumise par le Sénat. (art. 175).
Ces juges ne peuvent être révoqués avant la fin de leurs mandats, sauf dans certains cas de condamnation ou à la suite d’incapacité physique ou mentale permanente dûment constatée.
Attributions:
La Cour de Cassation statue aussi en toute affaire criminelle, correctionnelle ou de police pour vice de forme, pour cause d’incompétence, d’excès de pouvoir, de fausse interprétation, de fausse application de la loi, sur le recours en Cassation selon les prescrits de l’article 332 du Code d’Instruction Criminelle.
La Constitution rapporte aussi en son article 183 que la Cour de Cassation, à l’occasion d’un litige et sur le renvoi qui lui en est fait, se prononce en sections réunies sur l’inconstitutionnalité des lois. A cet effet, elle remplit la fonction de Cour constitutionnelle et doit siéger avec tous ses douze membres à moins qu’il y ait empêchement légitime. Le nombre ne peut toutefois être inférieur à neuf.
La Cour de cassation examine en droit, non en fait, les décisions prononcées en dernier ressort par les juridictions par les cours d’appel, lorsque ces décisions font l’objet d’un recours appelé « pourvoi ». Généralement les pourvois sont initiés par les avocats. Mais tout citoyen se sentant lésé par une décision judiciaire lui portant préjudice peut saisir La Cour de cassation. Pour ce, il doit faire la déclaration au greffe du tribunal ou de la Cour qui a rendu la décision.
Fonctionnement:
Les affaires portées devant la Cour de Cassation sont inscrites par ordre chronologique et identifiées par un numéro au moment du dépôt. Le statut d’affaires urgentes ou d’affaire ordinaires leur est donc attribué 5. Elles seront distribuées en conséquence par le président de la Cour ou le juge qui en fait fonction.
Si l’affaire passe l’audience, elle est appelée et jugée par ordre de priorité. Les décisions rendues alors sont irrévocables et s’imposent à tous sans exception sauf en cas d’erreur matérielle qui aurait échappé aux Juges.
Relation avec le deux autres pouvoirs:
✍ Notes:
- Décret publié dans le journal Le Moniteur du 1er février 2019.
- Avec les juges Joseph Jean Mécène et Wendelle Coq Thélo, le nom de Me Ivikel Dabrésil faisait partie d’une liste acceptée, après négociations, par l’opposition qui luttait pour le renvoi du président Jovenel le 7 février 2021. L’un de ces juges devrait alors remplacer le président, pendant la période de transition.
1er Coup de théâtre: Le 7 février 2021, le gouvernement dénonça une tentative de coup d’état et mit aux arrêts Me. Ivikel Dabrésil et une vingtaine de personnes, pour complot contre la sûreté de l’État.
2è Coup de théâtre: Apparaît dans le Moniteur du lundi 8 février, un arrêté présidentiel disant mettre la retraite les trois juges pressentis par l’opposition pour remplacer le président Jovenel Moïse (« Arrêté mettant à la retraite les citoyens Yvickel Dieujuste Dabrézil, Wendelle Coq Thelot et Joseph Mécène Jean Louis, Juges à la Cour de cassation. » Le Moniteur, 176è Année, Spécial No 9, lundi 8 février 2021). Une démarche contraire à l’esprit de l’article 177 de la Constitution de 1987.
3è Coup de théâtre: Un décret présidentiel publié dans le Moniteur du jeudi 11 février 2021, annonça la nomination de trois hommes de loi pour succéder aux suprêmes juges mis à la retraite. Il s’agit de Me Octelus Dorvilien [Président de la Cour d’appel des Gonaïves], de Louiselmé Joseph [Subtitut du Commissaire du Gouvernement près le Tribunal de première instance des Gonaïves], de Pierre Harry Alexis. Une fois de plus, les requis de la Constitution n’ont pas été respectés (art. 175). Ils n’ont jamais siégé à la Cour.
Trois semaines après l’assassinat du président Jovenel Moïse, Juge Wendell Coq Thelot fut accussée de participation dans l’assassinat et fit l’objet d’une interdiction de départ et d’un mandat d’arrêt, après que les mercenaires colombiens et des Haïtiens-Américains arrêtés à la suite du meurtre du président Moïse aient déclaré avoir rencontré Coq-Thelot, et aient indiqué qu’ils avaient été à deux reprises au domicile de la juge pour signer des documents. - « Décret du 22 août 1995 relatif à l’organisation judiciaire » Le Moniteur, No. 67, 24 août 1995; Article 129.
- Lois sur l’organization judiciaire du 8 juin 1835. Section IV, article 62.
- « Décret du 22 août 1995 relatif à l’organisation judiciaire » Le Moniteur, No. 67, 24 août 1995; Articles 151-152.