Faisons immédiatement le deuil du mot créole un devoir patriotique.
📅 Texte publié le vendredi 5 septembre 2008
Texte reçu le 5 septembre 2008
Par Prophète Joseph
Ainsi, on peut donner trois sens au mot créole.
- Sens 1 : Blanc d’origine européenne né dans une colonie.
- Sens 2 : Langue parlée dans une colonie. À ce chapitre, les chercheurs regroupent quatre types de créoles :
- Le créole à base lexicale anglaise que l’on retrouve dans les colonies ou anciennes colonies britanniques.
- Le créole à base lexicale portugaise que l’on rencontre dans les colonies ou anciennes colonies portugaises.
- Le créole à base lexicale espagnole que l’on rencontre dans les colonies ou anciennes colonies espagnoles.
- Le créole à base lexicale essentiellement gréco-latine que l’on retrouve dans les colonies ou anciennes colonies françaises telles que la Martinique, la Guadeloupe, etc.
- Sens 3: Langue en formation, langue qui n’a pas d’alphabet officiel.
Ces définitions correspondent surtout au statut de la Guadeloupe et de la Martinique pour ne citer que ces deux territoires français. Dans le cas d’Haïti, elles ne servent qu’à cacher à la face du monde son identité nationale et son statut de République. C’est pour cela qu’il convient de faire immédiatement le deuil du mot créole dans nos communications haïtiennes. Car le créole est utilisé consciemment ou inconsciemment pour assassiner haïtien. Il sert à masquer le mot haïtien qui évoque l’existence de notre peuple et ses créations.
Dorénavant, quand il s’agit d’Haïti, ne dites plus fusil créole, langue créole, restaurant créole, conte créole, littérature créole, communication créole, femme créole, créolophone, créolophonie, créoliste, etc. Dites plutôt, fusil haïtien, langue haïtienne, restaurant haïtien, conte haïtien, littérature haïtienne, communication haïtienne, femme haïtienne, haïtianophone, haïtianophonie, haïtianiste, etc. Le mot créole n’évoque pas l’origine nationale de l’objet dont on parle. À chaque fois, on fait l’usage du mot créole en lieu et place de l’haïtien, on contribue volontairement ou involontairement à la disparition du mot haïtien et ses attributions.
D’après Alain Rey, linguiste et auteur du Petit Robert, toutes les langues passent une étape appelée créole. Mais, lorsque le pays où une langue est parlée par une majorité de citoyens et de citoyennes décide d’adopter un alphabet officiel pour fixer le statut et l’appartenance nationale de cette langue, cette dernière change d’appellation CRÉOLE pour porter le nom de la nationalité du pays qui lui a donné l’alphabet officiel. C’est pour cela, on parle l’italien en Italie, le français en France, l’allemand en Allemagne, l’haïtien en Haïti, etc. La langue parlée en Haïti, s’appelle l’Haïtien depuis le 28 septembre 1979, date à laquelle le Parlement de la République adopta l’alphabet officiel de la langue haïtienne dans le cadre de la réforme de l’école fondamentale qui a été mise en place par le Décret-loi du 30 mars 1982. Ce Décret-loi stipule dans article 29 que l’haïtien est la langue enseignée et langue d’enseignement tout au long de l’école fondamentale. L’Article 5 de la Constitution de 1987, signale que l’haïtien est la seule langue qui unit tous les habitants d’Haïti. L’haïtien et le français sont deux langues officielles de la République d’Haïti.
Curieusement, dans le Décret-loi de 1982 et dans l’article 5 de la Constitution de 1987, c’est le mot créole que l’on a utilisé à la place de l’haïtien pour la simple et bonne raison suivante. Les législateurs et les constitutionnalistes haïtiens n’avaient pas fait appel aux spécialistes en aménagement de politique linguistique qui traitent la question du statut des langues. Toutefois, chaque citoyen, chaque citoyenne d’Haïti doit se faire un devoir patriotique en apportant cette correction dans ses conversations et à l’intérieur de tous les textes de loi du pays, car le mot créole sert à assassiner l’haïtien qui rappelle l’existence, les créations et le statut réel de notre peuple.
Prophète Joseph
M.éd., linguiste et professeur.