Leclerc sur les déportations des indigènes

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Dans ces moments de grandes tribulations, nous vous invitons à lire cette lettre de Leclerc (1) adressée au Ministre de la Marine, quelques mois seulement après le débarquement des troupes expéditionnaires à Saint-Domingue. Signalons qu’au moment de sa rédaction, le processus de déportations systématiques était déjà lancé, et tous ceux qui osaient se soulever contre la présence de cette force étaient qualifiés de brigands, devenant ainsi un condamné en sursis.


Au Quartier du Cap,

Le 29 Messidor (18 Juillet 1802)

Le Général en Chef au Ministre de la Marine

Citoyen Ministre,

Vous trouverez ci-joint la lettre originale que Toussaint écrivait au président de la commission de Constitution lorsqu’il apprit que nous nous disposions à reconquérir Saint-Domingue. Si le gouvernement français n’était pas parfaitement éclairé sur les venues de cet ambitieux, cette lettre servirait à fixer son opinion.

Je vous envoie par le Conquérant, Borgella et Collet, deux de ses constituants. Je vous ai envoyé par l’Union, Viard, autre constituant, ils resteront en prison à Brest à la disposition du gouvernement français; je me purge peu à peu.

La situation de la colonie est bonne; le désarmement des noirs s’opèrent sans bruit; quelques brigands sont réfugiés dans les montagnes, mais ils sont isolés et n’osent approcher (sic) des établissements.

Les Anglais de la Jamaïque ne voulant pas croire à la situation actuelle de Saint-Domingue viennent de m’envoyer un de leurs faiseurs pour connaître au juste notre position; comme elle est très bonne malgré les maladies qui continuent leurs ravages affreux, je leur laisse tout voir. Ce qui les étonne le plus c’est que je défende la colonie et que je châtie les perturbateurs avec les noirs. Je n’en serais pas là si j’eusse fait arrêter Toussaint le jour où il vint me trouver.

J’ai l’honneur de vous saluer.

Leclerc

  • Lettres du général Leclerc commandant en chef de l’armée de Saint-Domingue. Paris, Société de l’histoire des colonies françaises et E. Leroux, 1937; p. 194.